mardi, février 16, 2010

Ma deuxième année (de 1952 à 1953).

Je ne me souviens encore moins de ma deuxième année (entre l'âge de un an et l'âge de deux ans) que de la première. J'ai par contre des souvenirs nets de mes deux ans.
Mais je sais ce qu'on m'en a dit et j'ai des souvenirs vagues, indatables mais qui sont peut-être de cette époque là.
Mes souvenirs vagues :
je me souviens d'une tempête sur la mer. C'était en sepembre, je donnais la main à mon père et j'avais le bras en l'air car je n'arrivais pas encore à la hauteur de sa main.
On marchait sur la digue. Mon père a toujours adoré la mer en furie. Alors que nous étions déjà adolescents et même étudiants, il nous emmenait à la mer quand on annonçait des tempêtes ou de très grandes marées. Quand il y avait des paquets de mer qui se brisaient sur les digues (mais ne les brisaient pas encore!)
Je me souviens donc de ce jour où l'on marchait sur la digue. On était venu dans la voiture de quelqu'un d'autre. ça devait être nos voisins qui avaient eu une voiture avant nous, ils avaient une Traction Avant, c'est comme cela qu'on appelait ces grosses voitures noires aux immenses garde-boue et hautes sur pattes. Puis plus tard, ils ont eu une DS. Dans ces voitures on avait de la place. Et ils nous prenaient parfois avec leurs enfants. Toute une tribu dans une grosse voiture.
Ou alors c'était le demi-frère de mon père, celui qui était issus du deuxième mariage de ma grand-mère, car quand mon père a eu deux ans, elle était devenue veuve de guerre.
Mais je crois que c'était plutôt les voisins qui étaient avec nous.
On longeait la mer sur la digue et on voyait les cabines de bain flotter sur l'eau, c'était en Belgique. J'en ai un souvenir gris et sable, parce que la mer était grise, et le ciel était gris et la digue couleur de sable. Les cabines qui devaient être arrimées avec des espèces d'ancrages flottaient sur les vagues déchaînées et le niveau de la mer était à mi hauteur de la digue qui était haute à cet endroit.
Je sais que c'était en Belgique. Et que c'était en septembre (donc en 1952).
On est allé en vacances sur la côte belge avant. De temps en temps, on était rejoint par de la famille, comme le demi-frère de mon père, sa femme et leur fils, on entendait rire sa femme jusqu'au bout de la rue quand elle venait, tellement elle riait fort. Elle avait le même prénom que ma mère et elle criait à l'adresse de ma mère dans un gros rire communicatif "Ouh ouh! Jeanette!" Et comme ma mère était moins expansive, elle la regardait avec un regard mi-amusé, mi-gêné. Elle excusait ma tante auprès des gens de notre rue en disant : "Elle habite à la campagne!" Quand ma tante venait à la mer, toute la plage résonnait de ses "Ouh! Ouh!" et de ses rires sonores! Quand ma tante arrivait à la maison, on l'entendait alors qu'elle était encore dehors et descendait de la voiture en tenant les pans de ses robes fleuries pour ne pas la salir sur le marchepied. Et mes parents disaient "Ah! Ils arrivent! On entend déjà la tante Jeannette!"
Bon, sur la plage, on faisait des châteaux de sable et des barrages sur les ruisseaux qui se formaient à marée basse. Et on attendait que la mer montait pour voir tout s'écrouler : les châteaux de sable et les barrages. On faisait des barrages à l'avant des châteaux de sable pour qu'ils s'écroulent moins vite. J'ai pratiqué l'art du château de sable jusqu'à l'âge de 18 ans environ. Et l'art du barrage de sable encore plus tard. A 18 ans, j'ai fait la ville et les remparts de Carcassonne en sable sur la plage de Narbonne-Plage.
Je sais que je faisais des pâtés et aussi des barrages à un an. On allait jusqu'à mes 3 ans environ en vacances en juin. Donc, c'est en juin 1952 que j'observais très attentivement la construction du barrage qui devait résister le plus longtemps possible aux assaults de la mer du Nord en Belgique. J'avais l'air à cette époque d'un bébé très sérieux. J'étais debout à 13 mois. Donc, je savais bien marcher déjà. J'étais toute seule en train de regarder les grands s'affairer aux jeux de sable. Je regardais cela sérieusement. Je savais que je devais apprendre. J'avais l'air alors d'un bébé très sérieux, un bébé un peu joufflu, mais qui marchait. Je fronçais les sourcils pour comprendre ce que faisait "les grands". l'année suivante, j'ai comencé à sourire et à faire comme les grands, à tenir ma petite pelle comme la grande pelle de maman. C'était l'apprentissage de la vie qui commence très petit et faire des châteaux que la mer va démolir et des barrages qui peuvent craquer à la fois par la pression du ruisseau qui descend des grandes bâches en train de se vider dans la mer, c'était apprendre aussi la vie. Dangereusement même parfois, quand j'étais très petite mes parents étaient encore jeunes et ne se rendaient pas compte du danger!
Mes petits yeux noirs sous mes petits cheveux blonds, se plissaient au soleil et je fronçais les sourcils avec l'air de dire, que fait-on sur la terre? Mais déjà j'aimais l'odeur de l'eau salée et le goût du sel de la mer. Et l'odeur d'iode qui était bonne pour nous, les enfants. Personne ne savait que c'était même bon pour se protéger des dangers atomiques, ce n'est que quelques années plus tard, avec les essais du Sahara qu'on en parlera.
Mais c'est ainsi que j'ai aimé la mer.
A un an et un mois, j'étais déjà trop sérieuse. Mais heureusement j'ai compris très vite le sens du jeu.
On a parlé ensuite de mes souvenirs de mes deux ans. Avant d'avoir deux ans, en revenant des courses dans la grande rue commerciale où habitait mon grand père et où mon grand-père maternel avait son magasin de photographie (on passait leur dire bonjour en faisant les courses), on passait parfois par une toute petite rue qui s'appelait la rue de la limite. Je pense qu'elle devait aussi faire partie de la "frontière"avec la ville où j'ai habité ensuite.
Je me souviens bien qu'on passait par la rue de la Limite avant qu'il s'est produit la terrible chose qui -paraît-il et d'après ce qu'on m'en a raconté - a terriblement marqué mes 2 ans. Soit on passait au bout, soit on passait dedans, parce que cette rue plus étroite que les autres était un raccourci. Et ça je m'en souviens bien, et c'était avant la terrible chose qui s'est passée "rue de la Limite".
Cette terrible chose a dû se passer en 53, si j'avais deux ans, je ne sais plus en quelle saison, mais il ne pleuvait pas, c'est sûr.
Je me souviens que maman demandait "On prend la rue de la Limite ou on continue tout droit?" Peut-être que la rue de la Limite était un coupe-gorge?
Et je me souviens que ce soir là, arrivées sur le coin de la rue de la Limite (mon frère devait déjà aller à l'école, car il n'était pas là et ça devait être l'hiver, car il faisait froid au retour des courses), ma mère a dit "On prend la rue de la Limite ou bien.." J'étais debout à côté de ma poussette quand maman a posé cette question et qu'on s'est arrêtée pour tourner notre tête vers l'entrée de la rue de la Limite, et maman a arrêté la poussette et poussé des exclamations, dans la rue de la Limite, il y avait les pompiers et une maison qui fumait et des flammes. Et ma mère a dit : "Ne restons pas là! Courons vite!" Alors, on est allée tout droit, ma mère poussait la poussette en courant et moi je suivais accrochée à sa main tendue qui tenait mon bras tendu vers le haut. Maman a dit que cet évènement m'a beaucoup marquée et que je ne m'en souvenais sûrement plus car j'étais trop petite pour m'en souvenir, mais que c'était pour cela que j'avais une peur panique du feu. Mais là où je ne suis plus d'accord avec ma mère c'est que, en fait, je m'en souviens comme si c'étais hier, et je me demande qui de nous deux avait le plus peur, car même s'il y avait le feu continu et la cuisinière à charbon dans la maison, je n'avais encore jamais pris conscience que le feu pouvait détruire et tuer.
Et en courant à côté de ma poussette (je en sais pas si ma mère avait peur que le feu se propage à toute la ville, après tout, elle avait vécu la guerre), je posais des questions en demandant ce que c'était et maman disait indiquant une rue parallèle sur la gauche que l'on apercevait par les rues perpendiculaires. Ne regarde pas par là, on voit le feu et la fumée.
Et comme tous les enfants, j'essayais de voir avec curiosité.
Mais c'est rétrospectivement que j'eus peur. Quand je sus ce qui s'était passé exactement.
Après on a appris que quatre personne dont des enfants étaient morts dans cet incendie. Alors, j'ai su que le feu était dangereux. A partir de ce moment là, j'ai pleuré à chaque fois que mon père allumait la cuisinière à charbon, dans le fond de la cusine (pour le feu continu, ça allait encore, car il ne faisait pas de grandes flammes). Quand mon père mettait le papier journal pour allumer le charbon, qui n'était pas d'aussi bonne qualité que celui du feu continue, des grandes flammes sortaient par l'ouverture ronde au dessus de la cuisinière avant qu'il ne ferme le couvercle et j'avais alors, une peur panique, je me réfugiais dans le couloir froid. A partir de ce moment on a dû fermer la porte entre la cuisine et la salle à manger lors de l'allumage du feu et quand dans la ville ou la campagne, je voyais une maison brûlée, je fuyais ou je cachais ma figure derrière mes mains pour ne pas la voir.
Voilà l'évènement qui semble-y-il a terminé ma première année et m'a fait entrer dans ma deuxième année : après la peut des médecins, acquise dès l'âge de 8 mois, j'eus peur du feu.
amalia-dominique

Ma première année (3) et mes six ans... "Maman, j'ai six ans, il est six heures, et je m'ennuie..."

J'ai oublié un évènement important de ma première année, c'est qu'à la fin du mois de Mai, j'ai été baptisée.
Je ne m'en souviens plus, mais cela a été très important dans la suite de mon enfance et de mon adolescence. Car je dois dire que j'ai passé de longs moments avec la religion (catholique). Mon père était d'une famille très praticante, mon grand-père maternel était plutôt athé, du moins il était déclaré catholique, mais mettait toujours mon père, son gendre, en boîte au sujet de la religion, et ma grand-mère alsacienne, la femme de mon grand-père quasiment athé, était catholique.
Cela a été très important pour la suite de mon enfance. Mais pas pour ma petite enfance. J'avais vécu une enfance assez heureuse jusqu'à l'âge de six ans , sans penser beaucoup à la religion, il y avait bien St Nicolas qui amenait des jouets, et des statues dans l'église, avec des belles dames fleuries comme la Sainte Vierge. J'avais vécu jusqu'à cet âge sans être omnubilée par le pêché. Mais je ne pêchais pas, je n'avais pas envie de faire ce qui était interdit, je crois, tout simplement.
Cependant je philosophais déjà. Sur la vie et la mort. Je me demandais pourquoi ma petite soeur, pas celle dont j'ai parlé avant, mais celle qu'on n'a jamais vue, qui était morté-née et aurait dû naître trois ans et onze mois après moi, n'allait pas aller au ciel parce qu'elle n'était pas baptisée. Ce que c'était les limbes dont parlait maman où l'on était avant la naissance et où l'on retournait après, si on était pas baptisé, on n'allait jamais au paradis, même si on n'avait pas fait de péchés.
J'avais entre quatre et six ans, quand je me posais ces questions. Alors j'ai été un peu rassurée, quand vers l'âge de six ans on m'a envoyée au catéchisme pour faire ma communion à sept ans. Et je devais apprendre les leçons de catéchisme par coeur, en plus des leçons de l'école et des leçons de solfège.
Mais il y avait des péchés véniels et des péchés mortels et je n'avais jamais fait de péchés mortels, alors je ne pouvais pas aller en enfer et ça m'a rassurée.
En fait, quand j'étudie la façon dont je pensais dans mon enfance, j'ai l'impression qu'il y a eu "avant" et "à partir" du catéchisme et que finalement, j'étais beaucoup plus libre de mes pensées avant le catéchisme, car j'avais un questionnement intellectuel et qu'ensuite j'ai perdu ce questionnement quand on m'a donné des réponses toutes faites.
C'est juste avant six ans, que j'ai vécu une fin de vacances où mon frère n'était pas à la maison dans la journée. Il avait changé d'école pour aller en 8ème (CM1) dans une grande institution et moi, je ne commençais dans ma petite école primaire que le 1er octobre. Cela faisait peut-être un décalage d'une semaine ou deux pour la rentrée soclaire, mais je m'ennuyais dans le jardin près de la bassinne galvanisée ou flottaient nos petits bateaux de bois et je pensais toujours à cette petite soeur qui était patie aux limbes. Ma déprime vers six heures du soir éait si grande, que passant par la cour, j'accourais dans la cuisine où ma mère faisait la lessive dans la lessiveuse ou repassait en faisant chauffer les fers sur la cuisinière dont le feu brûlait pour faire la cuisine, même en été. Je regardais l'horloge. Mon père rentrait du travail souvent vers 20 heures. Il était 18 heures. Et je m'écriais "Maman, j'ai six ans, il est six heures et je m'ennuie.... Ce fût la première déprime de ma vie. Je savais lire, écrire, compter, lire les notes de musique avant même d'aborder "la grande école", mais ces vacances de trois mois m'ennuyaient. Même si on avait passé le mois d'août en Bretagne.
"Maman, j'ai six ans, il est six heures, et je m'ennuie..."
Ce que je voulais dire à propos du baptême, c'est que une fois qu'à la rentrée scolaire après mes six ans, je suis allée au catéchiseme, non seulement la religion m'a pris beaucoup de temps, mais en plus, elle m'a enlevé mon questionnement philosophique et métaphysique et que finalement, en m'amenant des réponses toutes faites, elle m'a rendue moins intelligente, elle m'a fait régresser dans mon développement et m'a tranformée réellement en enfant pour de longues années de la seconde enfance et de la pré-adolescence.
Mais, par ailleurs je dois dire qu'elle m'a donné une culture religieuse que beaucoup n'ont plus et une certaine notion de la morale.
amalia-dominique

Ma première année (2)

Je suis née en Mai au printemps.

Le seul souvenir de ma première année, mon otite en janvier ou février 1952. J'avais 7 ou 8 mois. Je l'ai déjà raconté.
J'ai eu de la chance de ne pas mourir, parce que à cette époque beaucoup d'enfants nés au printemps mouraient l'hiver suivant leur naissance. J'en ai eu la preuve récemment, non loin de la tombe de mes parents, il y a une tombe avec une grand-mère et deux petits enfants, les deux portent le même nom de famille que nos petits voisins que nous avons eu quand j'étais petite qui étaient âgés de trois quatre années de plus que nous. Ils avaient dû habiter dans la ville voisine où est le cimetière à cette époque, puis arriver à côté de chez nous ensuite, car on avait eu avant d'autres voisins qu'on a retrouvé ensuite comme voisins à la nouvelle maison dans la ville d'à-côté. Quand je dis la ville d'à côté, c'est un peu bête, parce que là-bas, toutes les villes se touchent et on passe d'une ville à une autre sans s'en apercevoir. D'ailleurs quand on a déménagé pour "la nouvelle maison", elle n'était qu'à 800 mètres de l'ancienne, mais dans la ville d'à côté! Dans l'ancienne maison on était à 5 maisons de distance de la ville d'à côté qui commençait au milieu d'une rue perpendiculaire! Enfin quand on a déménagé, on est passé d'une grande ville de 100 000 habitants à une petite ville de 20 000 habitants! A 800 mètres de distance seulement, même pas un kilomètre!
Bon, dans le cimetière, pas loin de la tombe de mes parents, j'ai vu la tombe de deux enfants qui devaient être les petits frères et petites soeurs de nos voisins qui ont dû arriver soit juste avant, soit juste après ma naissance, pour remplacer mes anciens et futurs voisins. Ou bien des cousins à eux. Mais toujours est-il que leurs parents venaient du midi, ils avaient d'ailleurs l'accent. Ce qui fait que dès mon enfance, j'ai été confrontée à toures sortes d'accents. L'accent alsacien d'une de mes grand-mère, un mélange d'accent flamand et wallon pour mon autre grand-mère, l'accent du Nord en général et l'accent du midi chez ces voisins qu'on voyait tous les jours et l'accent de Bourgogne chez la mère d'une de nos futures amies. C'était dans mon quartier un microcosme de la France, mais il n'y avait pas encore d'étrangers. L'immigration étrangère n'est arrivée que vers 1958 et ce n'étaient tout d'abord que des hommes qui venaient chercher du travail, essentiellement des algériens et des italiens. Et aussi des portugais. Eux venaient avec leurs familles, mais les algériens sont arrivés seuls et envoyaient leur argent à leur famille. Il y avait aussi des polonais, mais moins que dans les mines, et eux étaient installés depuis longtemps et parlaient français. Bon, bref, toute petite, je n'ai entendu que du français du Nord, de Belgique, de Bourgogne et du Midi tout en restant dans un rayon de 100 kilomètres et aussi le flamand de la côte que je ne connaissais pas, et le patois local.
Bref, je reviens à ces deux enfants, une fille étaient née à quelques jours de distance de mon grand-frère et morte en janvier suivant. Un garçon était né dix mois avant moi en juillet et mort en février suivant. C'est pour cela que je me suis dit que ces enfants là n'ont pas supporté l'hiver! Il y avait de terribles affections saisonnières à l'époque, comme celle dont je n'arrive pas à me débarasser maintenant et les maisons étaient assez peu chauffées.
Il y avait un feu continu dans le salon, dont la chaleur montait dans la chambre de mes parents, ce qui peut expliquer qu'ils nous gardaient, bébés ,dans leur chambre, mais ensuite, on allait derrière dans la chambre des enfants qui donnait sur le jardin et le chemin de fer. Les locomotives à vapeur faisaient trembler toute la maison quand elles passaient, mais les maisons étaient solides et resistaient.
Il y avait aussi une cuisinière à charbon dans la cuisine qui était une pièce rapportée derrière la maison et on laissait la porte entre la cuisine et la salle à manger ouverte, car la salle à manger n'étaient pas chauffée. Elle avait une fenêtre qui donnait sur la cour qui occupait la moitié de la largeur du jardin, l'autre moitié étant occupé par la cuisine et les toilettes. Mais on devait sortir dans la cour pour aller aux toilettes, mais je pense qu'avant l'âge de un an j'avais des langes (en tissu, les couches en papier ne sont apparues qu'à l'époque de la naissance de ma petite soeur).
Bon, enfin, quand je repense aux deux enfants morts des voisins, dont on ne m'a jamais parlé, car ils sont morts avant ma naissance, je pense que quand j'ai eu l'otite, ma mère s'est affolée, car elle a eu peur que je meure aussi.
Mes parents s'affolaient tout le temps quand on était malade. Vers l'âge de quatre ans, on était en train de traverser une rue quand j'ai senti une douleur dans le genou, et alors, mes parents ont eu peur que ce soit la poliomélyte, car des enfants l'avaient contractée dans le quartier. Mais ce n'étaient que des douleurs de croissance et on m'a donné plein de calcium.
Revenons à ma première année. Je me souviens aussi d'une époque ou je m'agrippai à la table de la salle à manger pour tenir debout, les bras presque tendus. Je faisais ainsi le tour de la table. Qui était carrée. Quel âge avais-je? Je n'arrivai pas encore à voir ce qu'il y avait sur la table. Et je jouais dans mon parc (je ne m'en souviens plus) et par terre sous la table (je m'en souviens!). J'avais des cubes en plastique rouges, bleu turquoise, et jaunes. Certains étaient bosselés. Il y avait des lettres dessus.
Je sais aussi qu'à l'âge de un ou deux mois, on est allés en vacances sur la côte belge. Mes trois premiers mois de vacances, je les ai passés sur la côte belge.
Quand mon frère deux ans et onze mois (ça fait presque trois ans) plus âgé que moi étaient petit, mes parents allaient en vacances à vélo à la campagne d'abord. Ils étaient allés à Ruminghem, près de la forêt d'Eperlecques et mon frère était sur le porte-bagage de ma mère. Dans un panier. C'est comme cela que l'on transportait les enfants à l'époque, quand encore peu de gens avaient une voiture. J'ai aussi été sur le deuxième porte-bagage dans un panier.
Je ne sais pas avec quel moyen de locomotion on est allé sur la côte belge. C'était à 70 kilmètres de chez nous. A cette époque, mon père n'avait pas encore d'auto, mais il utilisait celle de "l'usine" où il travaillait. Ce n'était pas vraiment une usine, mais une grande maison de VPC (Vente par Correspondance) et mon père avait un emploi de bureau. Quand on partait en vacances avec la camionette de l'usine, un ami de mon père prénommé Valère ramenait la voiture ensuite à l'usine et nous restions en vacances sans voiture. Parfois, il venait chercher mon père parce qu'on avait besoin de lui et il le ramenait un ou deux jours plus tard. C'est pour cela que quand j'ai eu cinq ans, et que mon père a acheté une 2CV, on est allé en vacances plus loin, pour qu'on ne l'embête pas pour son travail. Mais en Alsace, à 500 kilomètres de chez nous, il a encore trouvé le moyen de rencontrer des relations de travail, dans la papeterie dont je vous ai déjà parlé, où on nous a raconté des chose affreuses et aussi à la foire aux vins de Colmar.
Donc, à l'age de un ou deux mois, j'ai été prendre l'air marin sur la côte belge. Il y avait moins de pollution que dans la grande ville hérissée de cheminées qui culminaient à 60 mètres. Toutes des cheminées rondes de brique qui jouxtaient les usines textiles. Et sur lesquelles tombait la foudre des terribles orages. Elles servaient de paratonnerre. Et les orages ont commencé à faire des victimes quand on les a démolies après la crise du textile. La foudre est alors tombé sur la maison du successeur du bon médecin que l'on a eu à partir de la naissance de ma soeur en 1959, et qui était très âgé, mais comparativement aux médecins qu'on a eu avant, il ne donnait presque pas de médicaments. Adieu la pénicilline et compagnie, qu'on avait eu à chaque mal de gorge étant petits avec les badigeons. C'était des grand bâtons avec lesquels on mettait un produit sur la gorge. Ils avaient bon goût quand même. Mais je détestais les suppositoires. Je n'en ai d'ailleurs plus jamais fait usage depuis mon adolescence. Les médecins étaient une vraie torture pour les enfants et je les ai eu en horreur dès mon plus jeune âge!
Avant on a dû avoir deux ou trois médecins, un dans la petite enfance de mon frère, je n'ai pas dû le connaître, mais on en parlait souvent, alors c'est comme-ci je l'avais connu. Puis deux dans mon enfance à moi, dont celui de ma naissance. C'est ceux-là qu'on a beaucoup critiqué par rapport à celui de l'enfance de mon frère, dont on disait qu'on n'arrivait plus à en retrouver un aussi bon. Puis il y a eu le vieux médecin arrivé vers mes 7 ou 8 ans et qui s'est occupé de la naissance de ma soeur. Tant qu'il a été là, et avant sa retraite, personne n'a eu de maladie grave dans la famille. Je sais encore les noms de tous ces médecins, mais je les tairai ici.
Bon, bref, deux souvenirs de ma première année quand même, l'otite à 8 mois et la marche autour de la table carrée en me tenant avec les mains. Après je sais qu'à un moment, j'ai su regardé par dessus la table, mais je devais être plus âgée et j'y voyais les jouets de mon frère. Ses petits personnages de la taille des soldats de plomb et les petites autos. Je les prenais pour les regarder et je les remettais en place pour ne pas me faire attraper. En grandissant, j'ai eu le droit de jouer avec, et j'ai eu quelques jouets de garçon (par exemple des petites autos) parce que je les aimais. Bon, mais j'ai déjà dépassé ma première année, car on ne se souvient pas de grand chose de sa première année....
Sauf que j'avais une chaise haute de bébé qui me mettait à hauteur de la table pour manger et que je mordais dans les jouets, et dans les cols de mes petites vestes en laine, que je prenais des bains dans une bassine d'acier galvanisé et que je m'épongeais avec une grosse éponge que je pressais et dont coulait l'eau. Tout cela, on me l'a raconté ou je l'ai vu sur des photos en noir et blanc.
Je sais que j'ai bu longtemps le lait de ma mère qui a été peu à peu coupé par des biberons, avec du lait en bouteille avant de passer au vrai lait de vache qu'on allait chercher dans la ville voisine, qui avait encore quelques patûres à l'endroit où l'on a fait construire la nouvelle maison.
On m'a dit que j'ai parlé assez vite, que le premier mot que j'ai dit était "maman", comme presque tous les enfants. Puis "papa", évidemment! Quand à mon frère j'ai dû l'appeler Cocode avant qu'il ait son vrai prénom. C'est comme cela que dans un premier temps ma soeur l'a appelé aussi. Mon père m'appelait Nickette (parce que en réalité pour les lecteurs du blog, je ne m'appelle pas Amalia). De Dominiquette, vous avez tout compris!
On m'a dit que j'ai su marché tôt. En me tenant au rebord de la table, c'était plus facile! Il faudra que je retrouve l'âge. On a dû l'écrire quelque part. Ma mère tenait des registres dans lesquelles elle écrivait tout sur nous. Je pense que 'j'ai dû me lâcher de la table et des murs entre onze et treize mois. Je pense que c'était onze mois. Mon mari a eu une soeur qui marchait à 8 mois, mais c'est exceptionnel.
On m'a dit que j'étais un bébé toujours content, que je ne criais pas trop. Sauf quand j'ai eu mon otite, mais je me souviens que je pleurais pour faire savoir que je ne voulais pas qu'on me perce le tympan, ce n'était pas la douleur qui faisait mal. Quand je pleurai parce que j'avais faim (pas vraiment faim, j'avais surtout envie de voir ma mère...), c'est parce que on ne venait pas à mes premiers appels qui devaient être pris pour des gazouillis, mais l'effet que ça faisait extérieurement, je ne le savais pas. Moi, je criais "Alors, maman, tu viens!" Mais en fait, vers 6 mois, on entendait de l'extérier "Oo manman u in..." On ne s'est jamais demandé non plus ce que veut dire A rreuuh que disent paraît-il tous les bébés!!!.
Mais les bébés, c'est comme les animaux qui vous comprennent et ne peuvent s'exprimer, en fait, ils comprennent ce que vous dites, masi leurs paroles sont déformées parce que la forme de leur bouche ne leur permet pas encore d'articuler les consonnes convenableemnt. Les deux premières qu'ils disent sont le r et le m et puis vient le p, ils font ces deux lettres avec les lèvres et le rr avec la gorge et la langue, mais comment voulez-vous qu'ils fassent des t et des d avant d'avoir des incisives???
Les bébés savent tout de vous, retiennent tout, et vous vous croyez qu'ils ne savent comprendre et retenir que ce qu'ils disent. Vous avez tort! Ils apprennent à penser verbalement très vite.
Si on parlait des langues sans dentales, les bébés parleraient plus vite.
Parfois, c'est pareil pour les vieux, on ne comprend plus ce qu'ils disent quand ils oublient leur dentier! Et les jeunes parlent "saucisse" avec leurs appareils d'orthodentiste, chose à laquelle j'ai heureusement échappé dans mon enfance, contrairement à ma soeur qui en a nourri une haine irréversible des dentistes!
Bon, tous les anciens enfants ont des histoires pareilles à vous raconter... et nous sommes tous des anciens enfants, alors écrivez vos mémoires d'enfance, dans vos blogs, vos vraies mémoires d'enfance.
Ici, c'est une enfance d'après-guerre. Les jeunes de maintenant trouvent cela drôle, c'est vrai qu'on n'avait pas grand chose à l'époque, comparé aux enfants gâtés de maintenant!
amalia-dominique