Je suis née en Mai au printemps.
Le seul souvenir de ma première année, mon otite en janvier ou février 1952. J'avais 7 ou 8 mois. Je l'ai déjà raconté.
J'ai eu de la chance de ne pas mourir, parce que à cette époque beaucoup d'enfants nés au printemps mouraient l'hiver suivant leur naissance. J'en ai eu la preuve récemment, non loin de la tombe de mes parents, il y a une tombe avec une grand-mère et deux petits enfants, les deux portent le même nom de famille que nos petits voisins que nous avons eu quand j'étais petite qui étaient âgés de trois quatre années de plus que nous. Ils avaient dû habiter dans la ville voisine où est le cimetière à cette époque, puis arriver à côté de chez nous ensuite, car on avait eu avant d'autres voisins qu'on a retrouvé ensuite comme voisins à la nouvelle maison dans la ville d'à-côté. Quand je dis la ville d'à côté, c'est un peu bête, parce que là-bas, toutes les villes se touchent et on passe d'une ville à une autre sans s'en apercevoir. D'ailleurs quand on a déménagé pour "la nouvelle maison", elle n'était qu'à 800 mètres de l'ancienne, mais dans la ville d'à côté! Dans l'ancienne maison on était à 5 maisons de distance de la ville d'à côté qui commençait au milieu d'une rue perpendiculaire! Enfin quand on a déménagé, on est passé d'une grande ville de 100 000 habitants à une petite ville de 20 000 habitants! A 800 mètres de distance seulement, même pas un kilomètre!
Bon, dans le cimetière, pas loin de la tombe de mes parents, j'ai vu la tombe de deux enfants qui devaient être les petits frères et petites soeurs de nos voisins qui ont dû arriver soit juste avant, soit juste après ma naissance, pour remplacer mes anciens et futurs voisins. Ou bien des cousins à eux. Mais toujours est-il que leurs parents venaient du midi, ils avaient d'ailleurs l'accent. Ce qui fait que dès mon enfance, j'ai été confrontée à toures sortes d'accents. L'accent alsacien d'une de mes grand-mère, un mélange d'accent flamand et wallon pour mon autre grand-mère, l'accent du Nord en général et l'accent du midi chez ces voisins qu'on voyait tous les jours et l'accent de Bourgogne chez la mère d'une de nos futures amies. C'était dans mon quartier un microcosme de la France, mais il n'y avait pas encore d'étrangers. L'immigration étrangère n'est arrivée que vers 1958 et ce n'étaient tout d'abord que des hommes qui venaient chercher du travail, essentiellement des algériens et des italiens. Et aussi des portugais. Eux venaient avec leurs familles, mais les algériens sont arrivés seuls et envoyaient leur argent à leur famille. Il y avait aussi des polonais, mais moins que dans les mines, et eux étaient installés depuis longtemps et parlaient français. Bon, bref, toute petite, je n'ai entendu que du français du Nord, de Belgique, de Bourgogne et du Midi tout en restant dans un rayon de 100 kilomètres et aussi le flamand de la côte que je ne connaissais pas, et le patois local.
Bref, je reviens à ces deux enfants, une fille étaient née à quelques jours de distance de mon grand-frère et morte en janvier suivant. Un garçon était né dix mois avant moi en juillet et mort en février suivant. C'est pour cela que je me suis dit que ces enfants là n'ont pas supporté l'hiver! Il y avait de terribles affections saisonnières à l'époque, comme celle dont je n'arrive pas à me débarasser maintenant et les maisons étaient assez peu chauffées.
Il y avait un feu continu dans le salon, dont la chaleur montait dans la chambre de mes parents, ce qui peut expliquer qu'ils nous gardaient, bébés ,dans leur chambre, mais ensuite, on allait derrière dans la chambre des enfants qui donnait sur le jardin et le chemin de fer. Les locomotives à vapeur faisaient trembler toute la maison quand elles passaient, mais les maisons étaient solides et resistaient.
Il y avait aussi une cuisinière à charbon dans la cuisine qui était une pièce rapportée derrière la maison et on laissait la porte entre la cuisine et la salle à manger ouverte, car la salle à manger n'étaient pas chauffée. Elle avait une fenêtre qui donnait sur la cour qui occupait la moitié de la largeur du jardin, l'autre moitié étant occupé par la cuisine et les toilettes. Mais on devait sortir dans la cour pour aller aux toilettes, mais je pense qu'avant l'âge de un an j'avais des langes (en tissu, les couches en papier ne sont apparues qu'à l'époque de la naissance de ma petite soeur).
Bon, enfin, quand je repense aux deux enfants morts des voisins, dont on ne m'a jamais parlé, car ils sont morts avant ma naissance, je pense que quand j'ai eu l'otite, ma mère s'est affolée, car elle a eu peur que je meure aussi.
Mes parents s'affolaient tout le temps quand on était malade. Vers l'âge de quatre ans, on était en train de traverser une rue quand j'ai senti une douleur dans le genou, et alors, mes parents ont eu peur que ce soit la poliomélyte, car des enfants l'avaient contractée dans le quartier. Mais ce n'étaient que des douleurs de croissance et on m'a donné plein de calcium.
Revenons à ma première année. Je me souviens aussi d'une époque ou je m'agrippai à la table de la salle à manger pour tenir debout, les bras presque tendus. Je faisais ainsi le tour de la table. Qui était carrée. Quel âge avais-je? Je n'arrivai pas encore à voir ce qu'il y avait sur la table. Et je jouais dans mon parc (je ne m'en souviens plus) et par terre sous la table (je m'en souviens!). J'avais des cubes en plastique rouges, bleu turquoise, et jaunes. Certains étaient bosselés. Il y avait des lettres dessus.
Je sais aussi qu'à l'âge de un ou deux mois, on est allés en vacances sur la côte belge. Mes trois premiers mois de vacances, je les ai passés sur la côte belge.
Quand mon frère deux ans et onze mois (ça fait presque trois ans) plus âgé que moi étaient petit, mes parents allaient en vacances à vélo à la campagne d'abord. Ils étaient allés à Ruminghem, près de la forêt d'Eperlecques et mon frère était sur le porte-bagage de ma mère. Dans un panier. C'est comme cela que l'on transportait les enfants à l'époque, quand encore peu de gens avaient une voiture. J'ai aussi été sur le deuxième porte-bagage dans un panier.
Je ne sais pas avec quel moyen de locomotion on est allé sur la côte belge. C'était à 70 kilmètres de chez nous. A cette époque, mon père n'avait pas encore d'auto, mais il utilisait celle de "l'usine" où il travaillait. Ce n'était pas vraiment une usine, mais une grande maison de VPC (Vente par Correspondance) et mon père avait un emploi de bureau. Quand on partait en vacances avec la camionette de l'usine, un ami de mon père prénommé Valère ramenait la voiture ensuite à l'usine et nous restions en vacances sans voiture. Parfois, il venait chercher mon père parce qu'on avait besoin de lui et il le ramenait un ou deux jours plus tard. C'est pour cela que quand j'ai eu cinq ans, et que mon père a acheté une 2CV, on est allé en vacances plus loin, pour qu'on ne l'embête pas pour son travail. Mais en Alsace, à 500 kilomètres de chez nous, il a encore trouvé le moyen de rencontrer des relations de travail, dans la papeterie dont je vous ai déjà parlé, où on nous a raconté des chose affreuses et aussi à la foire aux vins de Colmar.
Donc, à l'age de un ou deux mois, j'ai été prendre l'air marin sur la côte belge. Il y avait moins de pollution que dans la grande ville hérissée de cheminées qui culminaient à 60 mètres. Toutes des cheminées rondes de brique qui jouxtaient les usines textiles. Et sur lesquelles tombait la foudre des terribles orages. Elles servaient de paratonnerre. Et les orages ont commencé à faire des victimes quand on les a démolies après la crise du textile. La foudre est alors tombé sur la maison du successeur du bon médecin que l'on a eu à partir de la naissance de ma soeur en 1959, et qui était très âgé, mais comparativement aux médecins qu'on a eu avant, il ne donnait presque pas de médicaments. Adieu la pénicilline et compagnie, qu'on avait eu à chaque mal de gorge étant petits avec les badigeons. C'était des grand bâtons avec lesquels on mettait un produit sur la gorge. Ils avaient bon goût quand même. Mais je détestais les suppositoires. Je n'en ai d'ailleurs plus jamais fait usage depuis mon adolescence. Les médecins étaient une vraie torture pour les enfants et je les ai eu en horreur dès mon plus jeune âge!
Avant on a dû avoir deux ou trois médecins, un dans la petite enfance de mon frère, je n'ai pas dû le connaître, mais on en parlait souvent, alors c'est comme-ci je l'avais connu. Puis deux dans mon enfance à moi, dont celui de ma naissance. C'est ceux-là qu'on a beaucoup critiqué par rapport à celui de l'enfance de mon frère, dont on disait qu'on n'arrivait plus à en retrouver un aussi bon. Puis il y a eu le vieux médecin arrivé vers mes 7 ou 8 ans et qui s'est occupé de la naissance de ma soeur. Tant qu'il a été là, et avant sa retraite, personne n'a eu de maladie grave dans la famille. Je sais encore les noms de tous ces médecins, mais je les tairai ici.
Bon, bref, deux souvenirs de ma première année quand même, l'otite à 8 mois et la marche autour de la table carrée en me tenant avec les mains. Après je sais qu'à un moment, j'ai su regardé par dessus la table, mais je devais être plus âgée et j'y voyais les jouets de mon frère. Ses petits personnages de la taille des soldats de plomb et les petites autos. Je les prenais pour les regarder et je les remettais en place pour ne pas me faire attraper. En grandissant, j'ai eu le droit de jouer avec, et j'ai eu quelques jouets de garçon (par exemple des petites autos) parce que je les aimais. Bon, mais j'ai déjà dépassé ma première année, car on ne se souvient pas de grand chose de sa première année....
Sauf que j'avais une chaise haute de bébé qui me mettait à hauteur de la table pour manger et que je mordais dans les jouets, et dans les cols de mes petites vestes en laine, que je prenais des bains dans une bassine d'acier galvanisé et que je m'épongeais avec une grosse éponge que je pressais et dont coulait l'eau. Tout cela, on me l'a raconté ou je l'ai vu sur des photos en noir et blanc.
Je sais que j'ai bu longtemps le lait de ma mère qui a été peu à peu coupé par des biberons, avec du lait en bouteille avant de passer au vrai lait de vache qu'on allait chercher dans la ville voisine, qui avait encore quelques patûres à l'endroit où l'on a fait construire la nouvelle maison.
On m'a dit que j'ai parlé assez vite, que le premier mot que j'ai dit était "maman", comme presque tous les enfants. Puis "papa", évidemment! Quand à mon frère j'ai dû l'appeler Cocode avant qu'il ait son vrai prénom. C'est comme cela que dans un premier temps ma soeur l'a appelé aussi. Mon père m'appelait Nickette (parce que en réalité pour les lecteurs du blog, je ne m'appelle pas Amalia). De Dominiquette, vous avez tout compris!
On m'a dit que j'ai su marché tôt. En me tenant au rebord de la table, c'était plus facile! Il faudra que je retrouve l'âge. On a dû l'écrire quelque part. Ma mère tenait des registres dans lesquelles elle écrivait tout sur nous. Je pense que 'j'ai dû me lâcher de la table et des murs entre onze et treize mois. Je pense que c'était onze mois. Mon mari a eu une soeur qui marchait à 8 mois, mais c'est exceptionnel.
On m'a dit que j'étais un bébé toujours content, que je ne criais pas trop. Sauf quand j'ai eu mon otite, mais je me souviens que je pleurais pour faire savoir que je ne voulais pas qu'on me perce le tympan, ce n'était pas la douleur qui faisait mal. Quand je pleurai parce que j'avais faim (pas vraiment faim, j'avais surtout envie de voir ma mère...), c'est parce que on ne venait pas à mes premiers appels qui devaient être pris pour des gazouillis, mais l'effet que ça faisait extérieurement, je ne le savais pas. Moi, je criais "Alors, maman, tu viens!" Mais en fait, vers 6 mois, on entendait de l'extérier "Oo manman u in..." On ne s'est jamais demandé non plus ce que veut dire A rreuuh que disent paraît-il tous les bébés!!!.
Mais les bébés, c'est comme les animaux qui vous comprennent et ne peuvent s'exprimer, en fait, ils comprennent ce que vous dites, masi leurs paroles sont déformées parce que la forme de leur bouche ne leur permet pas encore d'articuler les consonnes convenableemnt. Les deux premières qu'ils disent sont le r et le m et puis vient le p, ils font ces deux lettres avec les lèvres et le rr avec la gorge et la langue, mais comment voulez-vous qu'ils fassent des t et des d avant d'avoir des incisives???
Les bébés savent tout de vous, retiennent tout, et vous vous croyez qu'ils ne savent comprendre et retenir que ce qu'ils disent. Vous avez tort! Ils apprennent à penser verbalement très vite.
Si on parlait des langues sans dentales, les bébés parleraient plus vite.
Parfois, c'est pareil pour les vieux, on ne comprend plus ce qu'ils disent quand ils oublient leur dentier! Et les jeunes parlent "saucisse" avec leurs appareils d'orthodentiste, chose à laquelle j'ai heureusement échappé dans mon enfance, contrairement à ma soeur qui en a nourri une haine irréversible des dentistes!
Bon, tous les anciens enfants ont des histoires pareilles à vous raconter... et nous sommes tous des anciens enfants, alors écrivez vos mémoires d'enfance, dans vos blogs, vos vraies mémoires d'enfance.
Ici, c'est une enfance d'après-guerre. Les jeunes de maintenant trouvent cela drôle, c'est vrai qu'on n'avait pas grand chose à l'époque, comparé aux enfants gâtés de maintenant!
amalia-dominique